L’engagement collaborateur semble aujourd’hui devenir un enjeu majeur de toute politique RH, de tout manager, de toute organisation.
S’il ne l’est pas encore, il le deviendra sur les profils critiques pour les organisations, pour l’innovation notamment, et dont le recrutement va entrer en tension.
Quelle organisation accepterait de voir partir ses meilleurs atouts ? Non seulement elle ne les aura plus dans ses rangs, pire ils seront dans ceux des concurrents.
Il deviendra donc de plus en plus important d’avoir des collaborateurs engagés non seulement pour les conserver mais également afin qu’ils donnent le meilleur d’eux-même. L’engagement constituerait donc le fin mélange entre avoir des collaborateurs qui donnent le meilleur d’eux-même, et le fait qu’ils restent dans l’organisation.
A y regarder de plus près le terme engagement n’est peut-être pas le mieux choisi pour définir ce but poursuivi.
Selon le Larousse l’engagement est : « un acte par lequel on s’engage à faire quelque chose, une promesse, convention, contrat par lesquels on se lie ».
Amenons alors la notion d’implication, dont la définition est, toujours selon le Larousse : « Mettre beaucoup de soi-même dans ce que l’on fait ».Au regard de ces définitions, et si nous les appliquons au contexte professionnel, deux éléments majeurs apparaissent :
- l’engagement de fait (au sens de la définition précitée), puisque le collaborateur est sous contrat avec son employeur. Est-ce pour autant qu’il est impliqué dans son travail ? L’engagement ne signifie donc pas implication. Et c’est bien cette dernière qui est demandée par toutes les organisations.
- la notion de liberté. Lorsque l’on est engagé par une organisation, on signe son contrat, est-ce pour autant que l’on s’engage moralement ? En revanche, on consent à une perte de liberté puisque l’on accepte de se soumettre à des règles, à une hiérarchie…
L’implication apparaît comme étant de niveau supérieur car elle est morale et librement consentie. Comme évoqué précédemment, on met beaucoup de soi-même dans ce que l’on fait. On est donc libre de le faire ou pas. Si nous le faisons, c’est donc que nous avons sciemment fait ce choix, assurément pour des raisons personnelles.
Plus on a de raisons profondes de faire quelque chose et plus on y met d'implication. L'implication ne se décrète pas.
Plaçons-nous dans le contexte d’une relation humaine. Il y a en premier lieu une rencontre, puis une phase de découverte. Ces premiers éléments peuvent mener à une implication dans cette relation amicale ou amoureuse, puis pourquoi pas jusqu’à un engagement qui aura été choisi (PACS, Mariage ou engagement moral réel envers un(e) ami(e)). Ainsi l’implication précède l’engagement.
Dans le monde professionnel, la phase de rencontre et de découverte est très réduite, voire biaisée et l’engagement (le contrat) arrive quasi-immédiatement. Le contrat étant de rémunérer contre du travail. Ainsi l’implication n’est pas encore apparue dans le processus. Elle a pu être évoquée mais pas expérimentée, ni d’un côté, ni de l’autre. Et chacun attend maintenant de l’autre qu’il s’implique dans cette relation qui n’est plus libre puisque contractuelle. Bref, l’ordre naturel d’une relation est chamboulé.
Tout le challenge pour l'organisation est donc de donner envie aux collaborateurs de s'impliquer.
Examinons alors les facteurs d’implication dans un domaine, un contexte quel qu’il soit. Comme nous l’avons indiqué, plus nous avons de raisons personnelles de faire, plus nous nous impliquons.
Les facteurs d’implication sont principalement personnels.
Les facteurs d’implication sont les motivateurs qui nous poussent à agir, à nous impliquer.
Il existe deux types de motivateurs : extrinsèques et intrinsèques.
Pour résumer, les motivateurs extrinsèques principaux sont les récompenses, l’argent, une promotion…
Les motivateurs intrinsèques sont les valeurs fondamentales de chaque être humain. Parmi lesquelles la liberté, l’accomplissement de soi, la reconnaissance…
Nous savons scientifiquement depuis de longues années, (cf entre autres, Daniel Pink : La vérité sur ce qui nous motive. Ed : Flammarion. Coll : Clés des champs) que les motivateurs extrinsèques ne sont pas efficaces pour impliquer durablement un individu. Ils causent même, à long terme, plus de dommages qu’ils n’apportent de bénéfices.
Ainsi les seuls motivateurs durables, profonds sont les motivateurs intrinsèques. C’est en fait assez logique de penser que lorsque les individus agissent en respect avec leurs valeurs fondamentales, avec liberté, en ressentant une satisfaction et un accomplissement, il sont plus impliqués, non ?
Les exemples sont nombreux et l’on peut citer ceux de Wikipédia ou de Linux, ou de tous les systèmes open sources. Le principe est simple. Des milliers (millions?) de contributeurs bénévoles travaillent ensemble à créer, développer, améliorer des produits performants et gratuits. Souvent en plus de leur travail « classique ».
Plus les individus sont libres, plus ils s'impliquent.
Citons aussi tous les engagements associatifs, eux-aussi bénévoles.
Si ces personnes s’impliquent, souvent bien au-delà de ce qu’elles font dans leur travail journalier, c’est bien qu’elles y trouvent quelque chose qui n’a pas besoin d’être rémunéré. Quelque chose qui les nourrit en temps que personne, quelque chose qui les motive. Elle sont parfaitement libres de s’impliquer dans ces causes ou pas. Elle le font pour quelque chose qui transcende leur personne, tout en la nourrissant, quelque chose qui les dépasse. Cela peut porter plusieurs noms. En ce moment, celui à la mode est « le sens ».
Imaginons maintenant une organisation qui soit capable de nourrir les valeurs fondamentales de liberté, d’accomplissement de soi, de reconnaissance, sans pour autant augmenter les rémunérations. Il y a fort à parier que cela redonne « du sens » au quotidien des collaborateurs. Et comme nous l’avons vu,
la où il y a du sens, l’implication surgit et s’installe.
La relation à une organisation n'est pas différente d'une relation entre individus.
Imaginons-nous impliqués dans une relation à cette organisation quelques instants… N’aurions-nous pas à son égard respect, sentiment d’appartenance ? Envie de participer à sa croissance, son épanouissement ? Envie de la défendre si elle était attaquée ? Envie, naturellement, de partager cela avec d’autres personnes ? De communiquer sur la fierté d’en faire partie ?
Un programme d’employee advocacy paraîtrait maintenant totalement naturel et légitime car cela contribuerait au succès de cette organisation. Cette communication serait authentique et puissante puisque portée par les collaborateurs eux-mêmes. Ainsi la boucle vertueuse serait bouclée et pourrait continuer de tourner tant que ces fondamentaux seraient respectés.